La puissance des fées
Au fur et à mesure des pérégrinations de ce blog, je vous ai évoqué des contes évoquant les fées ((voir les articles du mois de juin 2020 : La fontaine embarrassée ou du mois d’août 2020 : Les enchanteresses de Lectoure, par exemple). Ce sont des êtres légendaires, généralement décrits comme ayant une forme humaine et féminine. Elles sont souvent d'une grande beauté, capables de conférer des dons aux nouveau-nés, de voler dans les airs, de lancer des sorts et d'influencer le futur. Selon les cultures et les pays elles varient sensiblement. Elles sont étroitement liées aux forces de la nature.
Voici deux nouveaux contes
De tous temps, à coté de Vernajoul, les fées se réunissaient souvent en de grandes assemblées sous un gros tilleul qui poussait là et facile à trouver. A l’ombre de ses branches, des banquettes de pierre leur permettaient de s’assoir autour d’un trône réservé à la plus puissante d’entre elles et qui présidait chaque réunion.
Les fées arrivaient des quatre points du pays, gracieusement assises en amazone sur des fils d’or et si à leur retour la porte de la maison était fermée, elles passaient facilement par le trou de la serrure sous la forme d’un souffle d’air. Les fées vivaient au milieu des humains mais dans un autre monde auquel bien peu d’hommes ou femmes avaient la grâce de franchir.
Cette présidente de l’assemblée des Fées s’appelait Falbala. C’’était la plus puissante de toutes les fées mais aussi la plus capricieuse. Si vous voulez en avoir une idée, écoutez, s’il vous plait, le récit de quelques vilains tours qu’elle était capable de jouer autrefois à ceux qui croisaient son chemin.
Une fois, un jeune homme, poussé par la curiosité, alla la consulter pour connaître son avenir. Mais c’était un mauvais jour pour voir Falbala car elle se présenta si brillante et si luisante que le pauvre curieux, rien que de la voir perdit la vue.
Un autre jour, fatiguée d’une longue course, la fée s’était doucement endormie auprès d’un chêne. Alors que plongée dans son sommeil en train de penser à des choses charmantes, elle fut brusquement tirée de ses rêves par un vaillant mais fort bruyant chevalier revêtu de son armure qui ainsi troubla son sommeil.
Pour le punir de sa témérité, d’un revers d e mains elle lui enlève sa monture et la lance on ne sait où exactement, par-dessus la plaine, par-dessus la montagne et le chevalier se retrouva bêtement posé sur sa selle tombée au sol. Le cheval envolé dans les airs retomba pétrifié tel qu’on le voit aujourd’hui au bout de la Serre de Vernajoul tourné vers Foix, dressé prêt à partir mais condamné pour toujours à être rôti par les rayons du soleil et à recevoir sur son dos de pierre, hivers comme étés, la pluie, la neige, le grésil, la grêle et tout ce que le vent apporte.
Vous ne devinerez jamais ce qu’elle fit à un benêt qui s’était présenté devant elle avec un bonnet de nuit sur la tête ? Qu’elle drôle d’idée me direz-vous, mais elle le lui arracha de sur la tête et elle le lui envoya voler dans le ciel si haut et si loin que l’on se demande que retombé par delà la rivière, par delà Foix. On n’est pas loin de penser que le bonnet n’est pas moins que ce gros rocher que l’on appel le « Pain de Sucre » à Montgaillard.
Voila la puissance de la fée Falbala était grande mais son comportement était peu charitable également. Tant de foutaises n’étaient pas bonnes, aussi plus personne ne voulut s’exposer à ses caprices. Pas une âme ne vint la voir tant et si bien que l’on fini par l’oublier.
Ennuyée de cet abandon, elle s’enveloppa un jour dans la brume comme on le fait dans un drap et elle partit pour des régions inconnues d’où elle n’est jamais revenue.
L’assemblée des fées de Vernajoul n’avait plus besoin d’exister puisque la puissante fée avait disparue. Les petites fées discrètes et peu soucieuses de se réunir par la suite ne fréquentèrent plus le gros tilleul et les banquettes de pierre ainsi que le trône finir par être recouverts de mousse et avec le temps disparurent totalement.
Voilà ce que le gros tilleul nous raconterai si ses branches cassée par les tempêtes, son tronc noueux ne servant plus que de nichoir aux oiseaux, fatigué d’exister ne s’était couché à la suite d’un gros orage.
A quelques lieues du village de Theilhet qui se trouve aux environs de Foix, vivait un paysan qui se nommait « l’Aïcholo ».
Il avait labouré pendant tout le jour dans la serre de Montcalm une terre ingrate et caillouteuse. Tant et si bien que le soc de sa charrue, à ce rude usage, elle était bien usée.
Le soir, il dit à sa femme, en s’en allant au lit : « Demain, il faut que je me lève de bon matin pour aller faire aiguiser le soc chez le forgeron de Teilhet ». Le lendemain, peu avant l’aube il se leva. Il déjeuna avec un crouton de pain trempé dans un grand bol de lait chaud. Cela fat, il prit un sac de toile y mit le soc dedans et il chargea le sac sur ses épaules. Enfin il s’en alla, marchant d’un bon pas à travers les serres vers le village de Teilhet.
Parti tôt le matin, la nuit étendait encore son grand manteau sombre dans cet endroit nommé « Les Clos du Paradis » La lune qui brillait encore faisait reluire le ruisseau comme un miroir d’argent et l’eau en sautant, tourbillonnant de pierre en pierre, faisait un bruit joli comme les grelots de la mule du meunier quand elle monte la côte « du Jous Carrière ». Le ruisseau prenait sa source dans la combe du Prayol et le chemin passait par là.
A cette source, « l’Aïcholo » vit deux femmes habillées de blanc, La rencontre était surprenante mais si ces dames faisaient de l’ouvrage, cela ne le regardait point même si le linge était lavé avec un battoir d’or.
L’« l’Aïcholo » se doutait bien que c’étaient des fées mais ce n’était pas une raison pour passer son chemin sans saluer ces dames et au bout d’un moment il leur dit : « Bonjour, petites dames, vous êtes bien matinales pour faire votre lessive. Les fées ne répondirent pas toutes occupées à leur ouvrage.
Alors l’« l’Aïcholo » continua son chemin. Il n’avait pas fait dix pas que le sac en toile se déchira laissant tomber le soc de la charrue sur son pied droit. « Aïe, Aïe, Aïe » cria-t-il sous l’effet de la douleur autant que de la surprise. « Seigneur ! Que j’ai bien de la misère, me voilà estropié pour le moins s’en ai fait de moi » et découragé il s’assit sur une pierre et pris sa tête entre les mains.
En l’entendant gémir ainsi les fées eurent pitié de lui et d’un pas léger, presqu’en volant les deux femmes elles arrivèrent près de lui. D’un coup d’œil elles comprirent d’où venait-le mal. Elles ôtèrent avec délicatesse son soulier et elles lui lavèrent le pied. Ensuite elles l’enveloppèrent dans une serviette blanche comme la neige et lui dirent : « Ne lavez jamais cette serviette elle vous protègera. Mais écoutez bien ce que nous allons vous dire : Quand vous cheminez de nuit ne parlez à personne car il n’est jamais bon de parler aux esprits. Passez votre chemin sans rien dire ».
Les dames en blanc retournèrent à la source et continuèrent leur ouvrage tandis que « l’Aïcholo » en clopinant continua sa marche. Mais peu de temps après il alla mieux et ses pieds se firent léger, que ses pieds ne touchaient plus terre, il lui semblait qu’il volait. Pour sur les fées avaient soigné et guéri son pied.
Il fit ce qu’il avait à faire au Teilhet pendant que le forgeron répara son soc de charrue et il prit le chemin du retour. Arrivé à sa cabane qui était tout à la fois, sa grange, son étable et sa maison il raconta tout à sa femme et « l’Aïcholo » n’oublia pas de lui dire la recommandation des laveuses de la source.
Avec le temps, sa femme ne pensa plus à l’affaire et un jour en faisant une lessive elle y mit la serviette des dames blanches. La serviette pouvait guérir certains maux mais Blanche comme neige qu’elle était, quand elle fut sortie du cuveau, celle-ci était devenue noire comme la suie de la cheminée et avait perdue tout son pouvoir de guérison.
Pour autant, « l’Aïcholo » n’oublia jamais ce qui lui avait été dit alors, lorsqu’il avait à sortir la nuit, il passait vite son chemin sans jamais répondre ni parler à personne, à moins qu’il ne soit sur que ce soit un ami ou une connaissance.